Et
si on écrivait un article autre que la mise à jour de son torsounet ?
Bonne idée , n'est-ce pas ? Et bien commençons avec un post super
joyeux.
Je
suis taraudé de questions depuis quelques temps (depuis ma naissance ?
ha ! ha !) J'esaie de mettre les choses en place, mais je n'y arrive
pas. Tout simplement.
Je
joue à l'ascenseur émotionnel en ce moment, avec des phases de
bien-être relatif et des phases franchement noires. J'ai l'impression
que la transition physique n'est rien face à la "transition d'esprit",
expression lue il y a peu et que je trouve très juste.
Je
m'aperçois qu'en ce moment, je suis plongé dans cette transition-là,
avec férocité. Il y a deux aspects, d'abord l'aspect mental. J'ai
l'impression d'être dans un corps morcelé : une tête de fille, des bras
de fille, un torse de mec, un corps de fille depuis le dessus du nombril
jusqu'au bas des pieds, truc gras et informe. Ça me pose problème et
suscite le fait que je ne suis absolument pas sûr de moi, que je mets
des plombes à m'habiller, que je ne suis jamais à l'aise quoique je
fasse comme effort pour gommer les courbes féminines. J'ai toujours eu
des soucis de confiance en moi, et j'ai le sentiment qu'ils sont
exacerbés ces derniers temps. Le miroir me pose vraiment problème. Il y a
des jours où je me trouve beau, du moins je me plais, et des jours où
je ne supporte strictement pas ma tête, mes hanches, mes bras. La taille
aussi recommence à vraiment me poser problème alors que je n'arrête pas
de croiser des mecs bios franchement plus petits que moi ou de ma
taille.On m'a dit que ma taille jouait contre mon passing. Cette phrase
m'aura plus meurtri que je ne l'espérais.
J'en
viens du coup à l'aspect mental. Au fil de mes réflexions, je me rends
compte que je serai peut-être plutôt agenre. Socialement, je me sens
plus proche, et plus à l'aise avec les femmes. Avec les hommes, je ne me
sens strictement pas à ma place, j'ai toujours la pression quand je
parle à un gars. Néanmoins, j'ai l'impression de n'appartenir ni à un
monde, ni à l'autre. Comme si physiquement, je cherchais à m'apparenter
aux hommes mais que mentalement, ce serait plutôt une orientation vers
les femmes. Pourtant, m'identifier agenre me gêne profondément. Je ne
m'y sens pas à l'aise non plus, déjà parce que cette place est
extrêmement inconfortable en société, et que non, ce n'est pas une
question de n'être ni l'un ni l'autre, ou un troisième genre, ou deux
genres à la fois. Le genre masculin me convient même si je n'entre pas
dans ses canons, ses stéréotypes.
Je
pense que le fait que je ne passe pas est crucial dans ce cheminement.
Si je pouvais me présenter au masculin sans ambiguité, je pense que je
vivrais mieux la situation. Là, chaque sortie et une lutte, chaque fois
je dois dire à chaque personne rencontrée que oui, je suis bien un mec,
et là, j'arrive à un point de saturation sur mon absence de passing.
J'ai
du mal à gérer la dichotomie entre mes aspirations à l'androgénie et
l'affirmation de ma place d'homme en société. Hier, je suis allé à une
soirée Rockabilly. La majorité des gens étaient habillés en conséquence,
moi itou. En résumé : filles très filles (robe, maquillage pin-up...)
et les mecs très mecs (chemises, rouflaquettes et compagnie) Et moi là
dedans ? J'avais vraiment le sentiment d'être une fille déguisée en mec
malgré ma superbe chemise rockab' que j'aime d'amour.
En
a résulté un profond sentiment de malaise, sans compter qu'il y avait
un monde fou, sans compter que j'ai croisé des gens que je côtoyais
pré-T et qui ne m'ont pas reconnu (et c'est tant mieux). Tirer un trait
sur le passé, ce n'est pas simple non plus mais je ne voulais pas qu'ils
me reconnaissent, je ne voulais pas avoir une millième fois à expliquer
mon parcours et devoir justifier mon choix de vie.
Je
crois que je n'ai jamais été aussi fragile qu'en ce moment, sans
compter que s'y ajoutent d'autres soucis que je n'évoquerai pas ici.
J'ai le vif sentiment d'être déraciné, de quitter une réalité que je
connaissais bien et que je vais appeler à l'arrache "le monde des
filles". Je pense que cela a été particulièrement difficile, car dans
une soirée "classique", où les gens sont habillés comme au quotidien par
exemple, il s'agit là d'un terrain neutre, un monde qui ne me concerne
pas vraiment. Que là, être plongé dans le rockab', un monde que j'ai pas
mal fréquenté en exacerbant ma féminité en mode pin-up, dans une forme
de féminisme mis en avant, un univers dont je connais très bien les
codes. Là, j'ai l'impression d'être balancé dans le monde des hommes
sans aucun mode d'emploi. J'ai l'impression qu'il me manque tout le
background d'une enfance et adolescence masculine, et j'ai eu le
sentiment d'être la fille qui joue au mec, vraiment l'impression de ne
pas être à ma place.
A
cette soirée d'ailleurs, j'ai croisé un (très beau) jeune homme. Grand
et fin, une crête, maquillé. Je lui en ai vraiment voulu d'être ce que
je voulais être. Mais je ne serai jamais grand, jamais fin, et il avait
beau avoir un look androgyne, il n'offrait pourtant aucun doute sur son
état de mec. C'est ça que je recherche, mais ça m'est inaccessible. Je
pense que je vais avoir du mal à gérer ça encore un temps. Le problème,
c'est que ça altère sacrément mon moral. Là, j'ai juste l'envie de
m'enterrer dans ma grotte et de ne plus jamais en sortir, ne plus être
confronté au monde, ne plus me heurter à ces points de comparaison qui
ne font que me ruiner le moral.
Je
n'ai plus envie d'entendre les couacs des gens qui laissent échapper du
féminin à mon encontre, je ne veux plus qu'on me parle de ma
transition. Je veux juste être un homme lambda sans que cela soit remis
en question dès que je fous un pied hors de mon appartement. Je suis
vraiment fatigué de tout cela. Je me dis que je devrais peut-être aller
voir un psy, vider mon sac, mais là, même souci. Si c'est pour tomber
sur quelqu'un qui me dit de m'habiller bien en mâââââle et de me couper
les cheveux pour être bien bonhomme, ça va juste me plomber ce qui me
reste d'amour propre. En gros, je ne me sens pas assez fort pour entamer
les démarches de trouver un psy souple et compréhensif, mais
paradoxalement, j'en ai besoin.
Voilà
bien le mot de la fin : le paradoxe. C'est vraiment ce qui m'habite en
ce moment. Le paradoxe entre les différentes parties de mon corps, celui
entre ce que je ressens et que j'ai du mal à cibler, ce que je voudrais
montrer et ce que les gens perçoivent. Apprendre aussi à passer du
statut de belle femme populaire à avorton introverti totalement
invibilisé. Ça aussi, ça pourrait s'arranger. Si j'avais plus confiance
en moi. Mais là, non, je n'y arrive pas. J'espère conserver des sursauts
de bonne humeur, comme il m'en arrive encore parfois. J'aimerais
surtout pouvoir vivre sans peur, mais ça, ce n'est vraiment pas gagné.
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