vendredi 18 mars 2011

Des bouts de rien

Moi qui n'aime pas mettre les choses dans des boîtes, les gens dans des cases, j'aime organiser mes articles de blog afin de ne pas parler de onze trucs différents dans un seul et même billet. Objectivement, il faudrait pour cela que je poste plus souvent alors allons-y pour des news, une chose à la fois, et tâchons d'être synthétique.
J'ai pris contact avec deux chirurgiens aux USA pour leur demander leur avis sur mon cas (ou plutôt sur mes miches). Les deux sont catégoriques, c'est la double qui m'attend. A moi les deux longues cicatrices et je pourrais concurrencer mes frangins dans un domaine où chacun se défend. Bizarrement, l'idée des marques ne m'affecte plus alors que je la rejetais en bloc il y a quelques mois. Peut-être parce que j'ai évolué, que j'intègre peu à peu que je suis trans, pas bio, et que je dois faire avec. Qu'une cicatrice, ça peut être très beau, que c'est l'histoire de mon corps, de mon parcours, et que de toute façon, je ne vais jamais à la piscine ou à la plage, hé !
Il me reste donc à contacter le chir français de mon choix, là-bas à Montauban. Planifier le trajet pour y aller est une réelle épreuve. Je n'y arrive pas. Je panique, je suis bouffé de stress. Mieux ? Il m'a répondu par mail en me disant de l'appeler et je n'y arrive pas, je suis totalement pétrifié. Non pas parce que ça devient concret, bien au contraire, mais parce que j'en suis encore au stade où sortir de chez moi est une épreuve, alors organiser un tel périple ! Et surtout, j'ai vraiment l'impression d'être tout seul dans cette merde, l'impression de n'avoir aucun soutien. Et ouais, ça pue. Hormis chez mes camarades trans, personne ne semble mesurer l'importance de cette opération j'ai l'impression, ça me soûle pas mal. (Ce "personne" désigne les gens de mon entourage que j'ai appelé à l'aide, pas ceux vers qui je ne me suis, pour le moment, pas tourné)
Bref. Restons-en là pour le coup' coup' du haut et passons au bas. Au bas, oui, moi qui clame à qui veut l'entendre que je ne veux pas de méta ou de phallo, je me retrouve à tout bonnement péter les plombs face à ma différence. Avec l'évolution de mon corps vers un masculin de moins en mois ambigu, je me retrouve à détester ce que j'ai entre les jambes. Je dois réapprendre que ma sexualité n'est pas féminine malgré ce sexe mais je n'y arrive pas. Je me sens à chaque fois frustré, j'ai de plus en plus de mal à prendre mon pied et par-dessus le marché je me sens vaguement humilié. Alors si j'ai pu les premiers mois de testo bénéficier d'une  libido galopante, je me retrouve de nouveau bloqué, mais pas comme avant. Avant, il n'y avait rien. Le désert, pas de libido, c'était facile à régler.  Pas de sexe et on en parle plus. Aujourd'hui, ma libido se temporise mais elle est présente, ce qui m'inflige une frustration plus grande que jamais. Je ne sais franchement plus quoi faire. Voir un psy pour en parler ? Peut-être. Je suis un peu dépassé par les évènements, je ne pensais pas que ce genre de ressenti, si primaire finalement, m'arriverait un jour.
J'ai pensé à la fausse queue pour satisfaire mon intellect mais je doute que cela marche, je n'ai même pas envie d'essayer. J'ai l'impression que cela ne fera qu'aiguiser ma différence et c'est sans doute plus que je ne puis le supporter. On va oublier donc. Serrer les dents et faire un joli sourire. On a toujours été doué pour faire croire que tout va bien.
Le 18 mars est un jour de merde. Sans doute l'un des jours où ma cervelle bouillonne et travaille le plus. Par je ne sais quelle ironie du sort, il m'arrive toujours des trucs sordides ce jour-là, et non, ce n'est pas lié à des beuveries de Saint Patrick, du moins pas toujours. A voir un cheval se claquer la tête contre les murs de douleur à cause d'une épaule cassée, le voir mourir sous mes yeux, repeindre le mur taché des rayures de ses dents et du sang de sa tête, à tout prix repeindre, pour ne pas que mon amie à qui appartenait ce cheval voit cela. Un bête 18 mars. Comme celui où il est mort, me glissant à l'oreille que c'était la fin, que c'était trop tard, que je n'avais clairement pas fait assez pour lui, que je n'avais pas eu le cran de faire ce qui aurait dû être fait. Quand j'ai dit à mon amie de piquer son cheval pour lui épargner la souffrance, moi, je n'ai pas su le faire pour le mien. Les miracles n'existent pas, il n'aurait jamais pu revivre, j'aurais dû faire ce choix au lieu de le laisser agoniser de cette façon. Allons bon, c'est du passé n'est-ce pas ? Une erreur à ne pas réitérer ? Eh bien aujourd'hui mon amie et moi avons de nouveau un cheval sur le fil de la mort et que doit-on faire ? Un concours de celui qui mourra en premier ? La compétition de la première euthanasie ?
C'est formidable, les souvenirs, cela vous crée, vous façonne au burin. L'être humain est un bloc minéral qui se dessine au rythme des coups de ciseau de la vie. Sauf que parfois, il y a un coup de ciseau de trop, qui coupe un bout de plus, un bout de cœur, un bout de bite, qu'importe ? Rien qu'on ne puisse faire renaître,  faire repousser. Serrer les dents, ouais, je l'ai déjà dit. Serrer les dents et faire comme ci tout aller bien, se noyer dans l'irréel, le plus possible, sans stupéfiants cette fois, sans alcool non plus. Oh Lord, je pars en vrille et raconte ce qui ne doti pas l'être. Allons bon. Restons-en là pour aujourd'hui.
 

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