mercredi 12 août 2009

Le blanc et le noir

Il est utopique de penser de façon manichéenne. Les choses seraient pourtant si simples : Le jour serait le jour et la nuit resterait nuit. Ni aube, ni crépuscule. Les garçons seraient des garçons et les filles des filles, sans nuance. Soit blanc, soit noir.
Le gris domine pourtant, et teinte toutes mes journées. Aujourd'hui Yann s'est intéressé de lui-même aux Trans', effeuillant le blog d'une MtF à la plume fine. Il m'a posé des questions, sur tout et rien, les termes à employer pour ne pas être blessant. C'était maladroit dans la forme mais il a fait un premier pas. Nous avons parlé. Je me sens bien. Blanc. Tout est blanc.
J'exploite pourtant chaque seconde jusque la lie pour ne pas penser, ne pas me perdre. Il y a une heure à peine, je n'aurai pas envisagé la menace d'une crise d'angoisse. Le simple fait de ranger une veste de cuir homme, à la boutonnière homme, à la carrure trop large et aux manches trop longues pour moi m'a porté un coup douloureux. Glisser le cuir havane entre les cintres de chemises et jupes noires, insérer une couleur terne dans mon puits d'ombre.
J'ai tenté de plier et de faire disparaître des vêtements de ma vue mais ma mascarade féminine présente depuis trop d'années m'a lié les mains. Je crois que sur l'instant, j'aurai pu les arracher et hurler mais j'ai lutté pour ne pas craquer, ne pas montrer mon désespoir à mon cher et tendre.
Les murs de l'appartement sont couverts de figures féminines, je viens de m'en rendre compte, qu'est-ce que je cherche à prouver ? Mon regard pour moi-même dans le miroir change. Je cherche le masculin en moi, trouve mes épaules trop étroites, mes hanches trop larges, rêve d'un torse plat. J'ai le sentiment d'être minuscule en homme, alors qu'en femme j'ai l'impression d'occuper trop d'espace.
Je n'ai pas encore eu le courage d'appeler un psy, ni même de donner mon nom choisi à ma moitié. Je sais que cela ne me dérangera pas si mes proches continuent d'utiliser mon nom de naissance, car je l'apprécie et qu'il est mixte. Ce jeu de prénom me semble qu'une infime tâche à accomplir dans l'immensité de mon parcours à venir.
Il y a une heure encore, je croyais commencer à être heureux.
Là, je comprends que je suis au fond du gouffre, que l'ascension sera longue et que je m'y écorcherai les mains, dans le noir.

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