Il est utopique de penser de façon manichéenne. Les choses seraient
pourtant si simples : Le jour serait le jour et la nuit resterait nuit.
Ni aube, ni crépuscule. Les garçons seraient des garçons et les filles
des filles, sans nuance. Soit blanc, soit noir.
Le gris domine
pourtant, et teinte toutes mes journées. Aujourd'hui Yann s'est
intéressé de lui-même aux Trans', effeuillant le blog d'une MtF à la
plume fine. Il m'a posé des questions, sur tout et rien, les termes à
employer pour ne pas être blessant. C'était maladroit dans la forme mais
il a fait un premier pas. Nous avons parlé. Je me sens bien. Blanc.
Tout est blanc.
J'exploite pourtant chaque seconde jusque la lie
pour ne pas penser, ne pas me perdre. Il y a une heure à peine, je
n'aurai pas envisagé la menace d'une crise d'angoisse. Le simple fait de
ranger une veste de cuir homme, à la boutonnière homme, à la carrure
trop large et aux manches trop longues pour moi m'a porté un coup
douloureux. Glisser le cuir havane entre les cintres de chemises et
jupes noires, insérer une couleur terne dans mon puits d'ombre.
J'ai tenté de plier et de faire disparaître des vêtements de ma vue mais ma mascarade féminine présente depuis trop d'années m'a lié les mains. Je crois que sur l'instant, j'aurai pu les arracher et hurler mais j'ai lutté pour ne pas craquer, ne pas montrer mon désespoir à mon cher et tendre.
J'ai tenté de plier et de faire disparaître des vêtements de ma vue mais ma mascarade féminine présente depuis trop d'années m'a lié les mains. Je crois que sur l'instant, j'aurai pu les arracher et hurler mais j'ai lutté pour ne pas craquer, ne pas montrer mon désespoir à mon cher et tendre.
Les murs de l'appartement sont couverts de figures
féminines, je viens de m'en rendre compte, qu'est-ce que je cherche à
prouver ? Mon regard pour moi-même dans le miroir change. Je cherche le
masculin en moi, trouve mes épaules trop étroites, mes hanches trop
larges, rêve d'un torse plat. J'ai le sentiment d'être minuscule en
homme, alors qu'en femme j'ai l'impression d'occuper trop d'espace.
Je
n'ai pas encore eu le courage d'appeler un psy, ni même de donner mon
nom choisi à ma moitié. Je sais que cela ne me dérangera pas si mes
proches continuent d'utiliser mon nom de naissance, car je l'apprécie et
qu'il est mixte. Ce jeu de prénom me semble qu'une infime tâche à
accomplir dans l'immensité de mon parcours à venir.
Il y a une heure encore, je croyais commencer à être heureux.
Là, je comprends que je suis au fond du gouffre, que l'ascension sera longue et que je m'y écorcherai les mains, dans le noir.
Là, je comprends que je suis au fond du gouffre, que l'ascension sera longue et que je m'y écorcherai les mains, dans le noir.
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